Comprendre un texte
Objectifs
I - Enjeux et objectifs
"Comprendre un texte" signifie :
- Percevoir le sens d’un texte, son message.
- Se faire une idée claire des causes, des motifs, de l’enchaînement logique du texte.
- Être capable d’identifier :
- son genre,
- sa tonalité,
- son originalité.
- Se l’approprier pour être capable :
- d’en parler,
- de l’expliquer à d’autres,
- de s’en servir dans une argumentation, une comparaison... - Se sentir capable de le juger.
Comprendre un texte sert à :
- Développer ses capacités d’analyse et de réflexion.
- Enrichir ses connaissances.
- Fournir des exemples précis à réutiliser dans un exercice plus général (discussion, dissertation, forum...)
- Aiguiser son goût, son sens critique, son écriture.
II - Procéder par étapes
1 - Soutenir sa lecture
- Utiliser le support du texte.
Y a-t-il un paratexte (ensemble formé par le péritexte et l’épitexte) ? C’est-à-dire :
des notes en bas de page,
une introduction,
une présentation de l’auteur.
- Chercher le contexte.
Le texte étudié se rattache-t-il à un contexte ?
Par exemple :
à un chapitre du manuel étudié en classe,
à un chapitre du cours donné par le professeur,
est-il utilisé dans un objectif grammatical, stylistique, culturel ?
2 - Comprendre le texte
Choisir un fil conducteur principal auquel se rattachent toutes les actions du livre et répondre aux questions suivantes :
- Lire le texte.
Comprendre un texte demande, avant tout, une lecture concentrée et exigeante, il faut donc lire le texte au moins deux fois.
Terminer par une lecture à voix haute :
Les difficultés ou les pièges sont souvent décelés par la lecture à voix haute : on bute sur une phrase dont on ne comprend pas le vocabulaire, la logique ou la construction. Il faudra donc y revenir dans les étapes suivantes.
- Annoter le texte.
Au fur et à mesure de votre lecture, repérer les passages difficiles, les mots incompris, les enchaînements d’idées peu évidents en mettant des points d’interrogation dans la marge ou en soulignant les mots incompris avec un crayon à papier.
- Utiliser des outils, supports de compréhension.
Pour assurer une bonne compréhension du texte, utiliser les outils appropriés :
Une construction de phrase indéchiffrable ?
Consulter le manuel de grammaire.
Une forme verbale étrange ?
Consulter le manuel de grammaire ou l’indispensable
Bescherelle (manuel pratique de conjugaison).
Un mot inconnu et que le contexte n’explique pas ?
Ouvrir le dictionnaire et, tant qu’on y est, noter l’étymologie (c’est-à-dire l’origine du mot, sa racine) et la sémantique (c’est-à-dire tous les sens du mot dans leur ordre d’apparition : on y découvre l’histoire du mot, ses sens anciens, oubliés, son sens propre et son sens figuré, etc.)
Une allusion historique ?
Chercher dans son manuel d’histoire, sur internet ou dans un dictionnaire des noms propres.
Un thème insistant et surprenant ?
Relire son manuel de littérature ou son cours.
Un propos qui semble relever de la vie intime de l’écrivain ?
Rechercher la biographie de celui-ci dans le manuel ou sur internet.
3 - Approfondir son analyse
Vérifier sa compréhension en appliquant une grille de lecture appropriée au type d’exercice demandé :
- Dans le cas d’une lecture cursive (faite rapidement, d’une seule traite) :
Il s’agit alors d’une compréhension globale, générale. Répondre aux questions suivantes :
Qui parle ?
De quoi parle-t-on ?
Dans quel but ?
Pourquoi avoir choisi ce texte dans l’étude en cours ?
- Dans le cas d’une lecture plus détaillée :
Elle est souvent accompagnée d’un questionnaire qui guide la compréhension : y répondre dans l’ordre, en se demandant ce que le manuel (ou l’enseignant) a voulu faire découvrir de particulier.
- Dans le cas d’un texte document :
Il s’agit d’un texte qui vient à l’appui d’un cours ou d’un exposé : il faut appliquer une grille de lecture comparable à celle d’une lecture cursive avec quelques approfondissements complémentaires choisis en fonction du sujet à traiter.
III - Trucs et astuces
- Utiliser un petit carnet pour noter la définition d’un mot cherché dans le dictionnaire afin de ne plus avoir à rechercher ce mot à l’avenir.
- Bien souvent une lecture attentive du paratexte ou du contexte (cours ou manuel) peut éviter des recherches plus poussées. La compréhension se fait par le biais d’une approche plus globale : on comprend un mot que l’on n’a pourtant jamais vu parce qu’on a jeté un coup d’œil préalable sur son cours, ou grâce à une petite note judicieuse du paratexte...
- Comprendre un texte, selon le dictionnaire, signifie "embrasser dans un ensemble, contenir en soi" : avoir réfléchi et... souffert, pour entrer dans la pensée d’un auteur, donne des idées, pousse à la contradiction, permet d’évoluer dans ses opinions, d’élargir son point de vue. On peut alors avoir envie de conserver comme un talisman une idée, une phrase, une expression qui résume cette rencontre avec la pensée ou le talent de quelqu’un d’autre.
Dans un petit répertoire de poche, noter l’idée ou la phrase, ou le vers qui a plu pour ne pas l’oublier. Peut-être même pourra-t-on l’utiliser une autre fois, dans un autre exercice... ?
IV - Exemple
Sujet
"Montrez que le texte de Victor Hugo, extrait de son Discours à l’Assemblée législative du 17 juillet 1851 (dans les Œuvres politiques complètes, 1802-1885) est un texte polémique."
Ce qu’il faut comprendre
Après la lecture de cet extrait, il paraît évident que, pour comprendre le texte il faut d’abord éclaircir la situation de son énonciation et donc :
- Cerner le contexte :
Utiliser le support du texte :
Le paratexte est dans le cas présent constitué d’une courte introduction en italique qui reprécise les bouleversements survenus : "Louis Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon Ier, élu président de la République au suffrage universel le 10 décembre 1848, propose la révision de la Constitution républicaine. Victor Hugo combat violemment ce projet."
Et le paratexte ajoute que l’extrait proposé est tiré d’un discours prononcé à l’Assemblée législative le 17 juillet 1851. Une note de bas de page précise aussi qui sont les "révisionnistes" dont parle ici V.Hugo : ce sont "des partisans de la révision de la Constitution."
Chercher le contexte :
Le contexte est aussi éclairant : il s’agit d’un texte polémique.
L’élève ira donc regarder dans son cours tout ce qu’il aura appris sur les caractéristiques de ce type de texte.
En histoire, il a aussi au programme le XIXe siècle et ses nombreux bouleversements : il sera sans doute intéressant de voir dans son cours ou dans le dictionnaire des noms propres que quelques mois après ce discours, Louis Napoléon est passé en force le 2 décembre 1851 en perpétrant un coup d’état " parce qu’il n’avait pu obtenir la révision de la Constitution".
Ce qu’il faut faire
Mais des points obscurs demeurent. Pour les éclaircir on aura recours aux outils appropriés :
- Comprendre le texte :
Après avoir annoté le texte, utiliser des outils, supports de compréhension de la lecture.
Exemples :
Une idée qui semble relever de la vie de l’écrivain : quel est le projet politique défendu ici par Victor Hugo ?
Dans le cours de littérature ou dans le dictionnaire des noms propres, on apprend qu’il a beaucoup évolué dans ses idées politiques : il a été un fervent admirateur de Napoléon Ier, par admiration pour son père, soldat de l’Empereur, puis a défendu la monarchie quand il était jeune, influencé par les idées de sa mère... avant de devenir un républicain convaincu... que Napoléon III exilera pendant 20 ans !
Une formulation contradictoire : dans le début de l’extrait, Victor Hugo semble prôner la République, mais il dit aussi qu’elle est la couronne du peuple... Étrange propos dans la bouche d’un républicain :
Le cours apprend que le discours polémique affectionne les mots-chocs... C’est donc une image forte, deux mots qui s’opposent dans une même construction.
D’après le manuel de français c’est un oxymore (allier deux mots de sens contradictoires pour leur donner plus de force expressive), puisqu’on donne à la république un des attributs de la monarchie : une "couronne" !
Le dictionnaire rappelle aussi qu’une couronne est "ce que l’on gagne après un combat" : le peuple a gagné la couronne de la République après de longs et sanglants combats, se souvient Hugo.
Un mot inconnu ; "paupérisme" :
Sans chercher dans le dictionnaire, la phrase précédente fait comprendre que c’est quelque chose qui a à voir avec la misère. On vérifie dans le dictionnaire : "état permanent de pauvreté", en effet.
Une phrase de conclusion à première vue énigmatique ; "Plus de paupérisme et plus de monarchisme" :
Faut-il comprendre "plus" comme "davantage" ou comme "plus jamais" ?
Que signifie ce "et" entre les deux groupes ? Quelle est sa valeur logique ?
En examinant le texte on trouve, plus haut : "Toute ma politique, la voici en deux mots : il faut supprimer dans l’ordre social un certain degré de misère et dans l’ordre politique une certaine nature d’ambition"
Le verbe "supprimer" est clair : "plus" a une valeur négative, et "et" signifie donc "par conséquent".
La phrase signifie donc : si l’on veut supprimer le paupérisme, il faut par conséquent éviter le monarchisme qui confisque le pouvoir de tous dans les mains d’un seul : le monarque (le roi).
- Approfondir son analyse :
Reste à vérifier sa compréhension en appliquant la grille de lecture cursive :
Qui parle ?
Victor Hugo.
À qui ?
Aux partisans de la révision de la Constitution qui sont ses adversaires politiques.
Quand et où ?
En 1851, à l’Assemblée.
De quoi s’agit-il ?
D’un discours contre la révision de la Constitution républicaine.
Pourquoi ?
Parce que la République est le fruit d’un long combat et qu’elle est devenue la couronne du peuple : ce dernier n’en veut plus d’autre.
Dans quel but ce discours ?
Rendre impossible le retour à la monarchie.
Pourquoi avoir choisi ce texte dans une étude de texte polémique ?
Parce que le ton, les images, les formes de phrase, la situation d’énonciation, tout renvoie ici aux caractéristiques du texte polémique.
Garder un souvenir
Et si on se gardait une petite phrase talisman ?
"Savez-vous ce qui fait la République impérissable ? C’est qu’elle s’identifie d’un côté avec le siècle, et de l’autre avec le peuple ! Elle est l’idée de l’un et la couronne de l’autre !"